"Le chemin de croix apparut en Europe à partir du XIVe siècle. Il s'agit d'une pratique inspirée de la procession des Latins de l'église du Saint-Sépulcre à Jérusalem, calquée sur les anciens cortèges byzantins dans la ville, et rappelant le chemin parcouru par le Christ le jour de la Passion depuis le Prétoire jusqu'au Golgotha."
"On a souvent affirmé que c'est la prise de Jérusalem par les Turcs khwarizmiens en 1244 qui a diffusé cette forme de piété en Occident. Rien n'est moins sûr, puisque dès 1322, les dominicains, puis en 1337, les franciscains sont autorisés par les autorités musulmanes à se réinstaller dans la ville. Ce sont eux, désormais préposés à la garde des lieux saints, qui vont propager l'idée du chemin de croix. Les frères mineurs vont proposer aux fidèles une sorte de pèlerinage de substitution à travers une méditation méthodique de la vie du Christ. Voyage tout intérieur dont l'idée est développée par Saint Bonaventure (1221-1274) dans les Meditationes qui se concentrent sur les moments de la Passion."
"De nombreux auteurs vont se consacrer au chantier ouvert par Saint Bonaventure. Les stations qui commémorent la Passion sont alors innombrables ; en 1395 à Jérusalem on signale 112 lieux saints qui s'égrainent à partir du Saint-Sépulcre selon un parcours à rebours de l'itinéraire du Christ. Pendant toute la fin du Moyen-Age, les disciples de Saint Bonaventure vont se consacrer à détailler chacune des étapes de la Passion au besoin en se référant à l'Ancien Testament quand les textes des Evangélistes faisaient défaut. Le procédé tirait sa justification du principe selon lequel de nombreux passages y préfigurent la vie du Christ. Grâce à ce travail, les artistes de la Renaissance sont capables de peindre avec précision et dans un accord impressionnant, chaque épisode de la Passion. Albrecht Dürer (1471-1528) a ainsi laissé six versions trés précises de la Passion. L'une d'entre elle, gravée en 1511 comprend 36 stations depuis la Cène jusqu'à la Pentecôte."
"C'est alors que l'on s'attacha à mettre de l'ordre dans ce foisonnement. Au XVIe siècle la commémoration des «marches douloureuses » du Christ alimente la devotio moderna. Cette pratique est inscrite dans les Exercices Spirituels de Saint Ignace de Loyola (1522)."